11 février 2013
Le roman Mrs Dalloway : convenances et déconvenues
Parfois, avec un peu de conviction, quelqu'un arrive à me mettre entre les mains un livre que je n'aurai pas ouvert de mon propre chef. Et je serai passée à côté de quelque chose de beau et touchant. L'écriture de Virginia Woolf m'a surprise et son originalité a effacé mes réticences sur l'aspect classique de son style (je n'aime pas la période classique, tout Arts confondus).
Un classique moderne incontournable pour les lecteurs avisés
Mrs Dalloway raconte une journée dans la vie de Clarissa Dalloway, une femme d'une cinquantaine d'années, aristocrate, qui vit dans le Londres d’après la seconde guerre mondiale. C'est une journée très particulière de préparatifs pour une fête qui se déroule le soir venu. Les points de vue se succèdent à mesure que les personnages se croisent, parfois sans un mot. Virginia Woolf saute ainsi d'un narrateur à l'autre, dans un désordre apparent, alternant hommes et femmes, aristocrates et gens du peuple. Des personnages de toutes conditions, de toutes cultures, variant sensibilité, intelligence et même état de santé mentale. À chaque fois, l'écriture s'adapte. Petit à petit, on devine que tout est centré sur Clarissa : Clarissa et sa soif de mondanité de grandes qualités, Clarissa organisatrice hors pair de soirées très courues, Clarissa épouse modèle et mère aimante...
Outre l'écriture, novatrice et résolument moderne pour l'époque, la structure du roman est également très bien pensée. Dubitative sur certains passages, certains personnages et surtout certains événements, j'ai compris, une fois le roman achevé, toute la virtuosité de la construction. Si chaque point de vue est comme une scène miniature d'introspection, ce qui s'en dégage est résolument centré sur Clarissa, Sally - une amie de sa jeunesse qu'elle ne côtoie plus - et Peter, son amoureux éconduit de la même époque. Virginia Woolf effectue non seulement des sauts entres les personnages mais elle fait aussi des sauts dans le temps, entre un présent débordé par les préparatifs et les soucis du quotidien, et le passé, chargé des souvenirs d'une jeunesse dorée, pas aussi lisse et heureuse qu'on pourrait croire.
Femmes de caractères
Le personnage de Clarissa, égoïste, arrogante, pourrait rebuter. Pourtant, on la connaît de l'intérieur, on comprend ses choix, et surtout la pression sociale et la difficulté même de manoeuvrer dans un monde et une époque, où née femme, certaines possibilités lui était retirée de part son genre. Jamais on ne tombe dans le pathos, au contraire. Malgré le choix d'une narration subjective, Virginia Woolf réussit à conserver une distance dans son ton et une impression de clareté, de netteté se dégage peu à peu. On connait Clarissa. On comprend ses tourments, ses dénis, mais aussi ses choix.
Virgirnia Woolf a eu elle même une vie difficile et hors norme. Féministe, lesbienne, elle a marqué son époque et reste aujourd'hui un auteur incontournable. Ce roman m'a laissé une impression très forte et j'ai vraiment envie de lire le reste de son œuvre. Le personnage de Clarissa est d'une complexité étonnante. Elle qui ressemble à un miroir brisé, chaque facette est lisse, parfaite mais quand on les assemble, il manque toujours des bouts. Il y a des artères coupantes. Impossible de reconstituer l'intégrité perdue.
Virginia Woolf est, à mon avis, aux antipodes de Jane Austen, une autre écrivain anglaise très célèbre. Si j'apprécie cette dernière - c'est mon côté fleur bleue - son écriture n'a rien de révolutionnaire et son regard reste celui d'une femme de la classe supérieure. Même confrontée à la pauvreté ou à des désirs d'émancipation, ses personnages arrivent à s'épanouir et à trouver amour et bonheur. De plus, elle les décrit dans leur jeunesse. Virginia Woolf, elle, dans Mrs Dalloway prend un protagoniste dont la jeunesse est dernière. Il n'y pas de grand projet, pas de grande aspiration. Juste la fièvre presque compulsive d'être une maîtresse de maison parfaite. De la nostalgie, du regret, un constat froid et objectif sur une existence qui pourrait sembler parfaite, de l'extérieur, mais qui en final ressemble a un gigantesque gâchis, à un sabotage amoureux. Un roman qui ne m'a pas laissé indemne.
Merci pour ce billet, je ne sais pas si tu sais mais il y a eu un film à partir de ce livre avec Meryl Streep, Nicole Kidman et Juliane Moore : the hours ;)
RépondreSupprimerIl faudra décidément que je lise cette auteure, tu m'as encore plus donné envie de le faire. Allez, hop, sur ma liste !
RépondreSupprimerSi nos route se croisent, je franchirais sûrement le pas, tu m'as convaincue ! Je dis seulement si nos routes se croisent parce que là si je vais direct l'acheter ma pal va me rebuter et me décourager !! Bisouxx
RépondreSupprimerKaeru,
RépondreSupprimerJe crois bien que tu m'as convaincue : à ajouter dans ma livre des livres à lire !
Maïeva Voyage
Je prends enfin le temps de sortir de sous ma couette où je cultive mes microbes pour vous répondre !!!
RépondreSupprimerElynor : je sais, l'amie qui m'a prêté le bouquin a le DVD, on doit le regarder ensemble *_*
Maïeva et Sabine : si vous êtes motivées, je vous conseille le coffret intégrale en poche trouvable pour une vingtaine d'euro sur le net. Il fait plus de 1200 pages sur un format assez petit. Donc prend peu de place dans la bibliothèque ! Après, c'est du papier bible donc toujours enquiquinant pour tourner les pages.
Onee-Chan : j'ai réglé définitivement le problème de ma PAL ! Je n'en fais plus :P J'adopte la devise shadok, quand il n'y a pas de solution, c'est qu'il n'y a pas de problème. En final, j'apprécie plus mes lectures (et La Moustache couine parfois parce qu'il y a des bouquins partout à la maison).
Merci pour vos commentaire !
*file au lit*
Ça donne envie d'en savoir plus, merci !
RépondreSupprimerconnaissais pas, cela donne envie
RépondreSupprimerJ'ai envie de lire ce roman. J'aime beaucoup Jane Austen mais je n'avais jamais réalisé que tous ces personnages étaient jeunes et accédaient à l'amour et au bonheur. j'aime également Barbara Pym, qui a plus de noirceur et de réalisme. Merci de m'avoir donné envie de découvrir un auteur que je ne connais pas encore
RépondreSupprimerMusme : j'ai aussi un des charmes de Jane Austen, j'ai de la lecture un peu fleur bleue mais comme la caractérisation est parfaite avec une pointe d'ironie, on ne sombre pas dans la guimauve. Je ne connais pas du tout Barbara Pym ! Il faut que je me renseigne !
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