C'est couillon, quand on vit dans un étang, de manquer d'eau. Depuis quelques semaines, je rame. À sec. Pas une ligne sur mes projets perso, mon roman végète dans un coin et mes appareils photos prennent la poussière. Bien sûr, c'est l'hiver. Et puis je ne suis pas sortie de Paris depuis trop longtemps. La méteo est peu propice aux promenades photo. Mais c'était surtout côté cœur et moral que cela flanche.
Ma vie est cool. Je ne me plains pas.
Comme tout le monde j'ai mes fêlures, mes contrariétés.
Il s'est passé quelque chose l'été dernier qui m'a fragilisé. Rien de grave. À l'échelle d'un humain, rien n'est jamais grave. Sauf la mort. Et encore, c'est plus définitif que grave. Je ne me sert pas souvent de ce blog pour déverser mes états d'âme, mais après tout, vu que je suis ici chez moi... Et puis, rien ne vous oblige à lire mes divagations !
Au mois d'août, je me suis disputée avec mon père. Ou plutôt, suite à une incompréhension débile, il a coupé les ponts. Il faut être deux pour une dispute et là, c'est unilatéral. Je ne suis pas une tête de mule, j'ai plus d'ambition que d'égo ; alors j'ai tendu la main. En retour, j'en ai mangé une sévère dans la tronche. Vraiment sévère. Comme je suis têtue et très optimiste, j'ai réitéré pour la nouvelle année.
En vain.
Au printemps je retourne à Nice pour voir ma maman. J'espère qu'à
cette occasion, j'arriverai à jeter un pont au-dessus de ce gouffre qui
me sépare maintenant de mon géniteur.
Voilà. C'est con.
Pas de drame, juste des humains incapables de communiquer. La source de bien des maux de ce monde. Mon père atteint un âge où sa vie se transforme en souvenir. Si certains petits vieux s'adoucissent avec le temps, d'autres se racornissent et leur quotidien rétrécit. De jour en jour, la fenêtre devient plus étroite, l'espace plus étriqué.
Je me demandais souvent comment dans des familles on pouvait arriver à ces situations ubuesques où des proches ne se parlent pas durant des années. J'ai toujours pensé qu'avec de l'énergie, un peu de tolérance, de l'amour et l'envie de se comprendre, il était possible de discuter. Le principe de la famille c'est qu'on s'aime, au départ, par devoir, par habitude. Pas parce qu'on se connaît ni qu'on a des affinités, mais à force de vivre, grandir ensemble, de se côtoyer, on s'aime.
Enfin, souvent.
Souvent aussi on aime ainsi des personnes qu'on aurait ignorées voire même détestées cordialement si elles étaient des inconnues.
Bizarrerie et charme des familles.
Je suis lucide.
Mon père ne changera pas.
Je l'accepte tel qu'il est, je n'ai pas vraiment d'autre choix. Cependant, je tiens quand même à me faire respecter. Les compromis ne me dérangent pas à condition que je n'abdique pas mon amour propre et mon éthique. Je voudrais retrouver cette relation que j'ai mis des années à établir avec lui. Nous sommes trop différents, impossible pour nous de nous comprendre et puis, en face de lui, je n'ai pas les bonnes armes.
Je sors toujours meurtrie du combat.
Avec le temps, j'ai trouvé des solutions, certes bâtardes, mais des solutions quand même, pour tenter d'avoir un échange, au moins un lien.
Il a tout foutu par terre. Je suis en colère. Un peu à court d'idée aussi. Je sais que je vais revenir à la charge. Encore tendre la main et tenter d'esquiver les coups. Je n'arrive plus à croire que ça sera facile, j'attends toujours cette compréhension, cet intérêt à mon égard que mon père est incapable de me donner. C'est pas sa faute. Il n'est pas câbler comme ça.
Mais ça fait quand même mal.
Et surtout, j'en ai MARRE que cette histoire me siphonne ma créativité et mon inspiration. Il est temps que je me passe à autre chose !
Les photos ont été prises en aout 2012 à Saint Jean Cap Ferrat