L'automne est venue d'un coup. J'étais enfermé à écrire, bien au chaud à la maison, les yeux rivés sur le clavier. Des mots plein la tête. Des phrases qui s’agencent, se délitent, dansent, séduisent. Petit à petit, un roman qui se construit.
Et puis, j'ai levé le nez. Par la fenêtre, du soleil.
Les feuilles des althéas jaunissent et flétrisse.
L’automne est là.
Alors, malgré le retard dans l'écriture, malgré les impératifs de terminer ce foutu roman avant la fin de l'année, j'ai tout envoyé balader pour une heure, juste pour une heure, au cimetière du Père Lachaise.
Une heure de respiration.
Laisser les personnages se débrouiller tout seul, lâcher le contrôle. Profiter d'une fin d'après-midi de novembre encore douce.
L'automne est arrivée avec son parfum de feuille pourrissante, l'humidité qui se niche au pied des arbres et des cryptes, les marrons joueurs en embuscade dans les chemins.
Les chrysanthèmes de la Toussaint discutent d'une tombe à l'autre, rivalisent de jaune, de pourpre et de violet profond.
Crânement, elles toisent le promeneur curieux.
L'eau stagne dans les pots de fleurs abandonnés, les urnes et les interstices des vieilles pierres. A sa surface, des secrets changeants.
Une plume, la ligne dorée des arbres ou juste de la poussière de la ville. Au loin, la circulation des voitures.
Il est cinq heure.
La lumière rasante découpe les croix dans le ciel avec une vigueur. Les ombres des vies passées. Il est temps de rentrer.
À la maison, les mots m'attendent.