Le 9 mars, dans les rues de Paris, nous étions des milliers à défiler et surtout à se tenir la main, reliés par notre conviction qu'il faut arrêter aujourd'hui d'utiliser l'énergie nucléaire, qu'elle soit pour le civil ou le militaire. À Opéra, l'association japonaise
Yosomono veillait à ce que les victimes de Fukushima ne soient pas oubliées.
Arrêter de nous prendre pour des imbéciles !
Main dans la main, chair contre chair pour défendre la vie contre l'utilisation sans conscience de l'atome et surtout contre une énergie qui génère des déchets mortifères qu'on ne sait pas retraiter,
nous avons marché et entouré des bâtiments avec une symbolique forte.
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Un combat pacifique |
Le nucléaire est une énergie qui pollue, qui abîme sans qu'on sache comment gérer les conséquences de son utilisation.
Le problème est présenté comme complexe avec de multiples facteurs imbriqués : déjà la difficulté de comprendre les notions scientifiques, ensuite, des retombées économiques et financières. Les pro-nucléaires, et tous ceux qui n'ont pas envie de remettre en cause notre énergie, brandissent la menace du " retour à la bougie" si on arrête les centrales. Une image forte. On est prêt à tout pour garder son confort moderne, quitte à flinguer la planète et quelques innocents.
En réalité, la question du nucléaire est très simple et se résume aux propos du professeur Koide : une centrale nucléaire est comme un appartement qu'on aurait construit sans mettre de toilettes. À la fin, on meurt étouffé, noyé sous les excréments.
Charmant hein ?! Alors, vous souhaitez toujours conserver votre mode de vie, quitte à en crever ? Bien sûr, on peut aussi parier que la catastrophe arrivera à la génération suivante. Je n'ai pas d'enfant, pourtant, je me sens responsable du monde que je leur laisse.
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Une chaîne humaine pour protéger la vie |
Moi, je choisis la vie, le respect de l'environnement et surtout, la santé des générations futures. L'argent, l'économie ne sont que des épiphénomènes à l'échelle des temps géologiques. Nous oublions trop souvent que la planète ne nous appartient pas, même si nous vivons dessus. Il existe des solutions alternatives qui ont souvent comme gros désavantages de demander 1) que les gens réfléchissent par eux-même notamment aux conséquences de leur actes 2) d'être incompatibles avec les règles de notre société de consommations.
Moi, je choisis de me servir de mon cerveau, même s'il n'est pas forcément un modèle de compét, j'arrive à m'en contenter pour être heureuse et tenter de faire en sorte que ceux autour de moi le soit aussi. Je sais que mon comportement est loin d'être parfait pourtant, je sais aussi que mes efforts ne sont pas vains. Au mieux, ils sont une petite goutte dans un océan avec d'autres petites gouttes avec une conscience civique, au pire, je mourrais droite dans mes bottes vertes de grenouille.
Être là, partager l'énergie d'une lutte pour la vie.
Ma réflexion sur mon mode de vie ne date pas d'hier et elle est encore balbutiante. Mais, je sais quand me positionner. Touchée dans mon cœur par le tremblement de terre de 2011 au Japon, j'ai compris rapidement que la vraie horreur était l'accident de Fukushima. Être présente lors de la chaîne humaine du 9 mars était plus qu'une évidence, c'était une nécessité.
Je n'aurai jamais cru que la manifestation serait aussi joyeuse. Malgré la colère et l'indignation, malgré le raz-le-bol face aux mensonges et aux discours démagogiques des lobbies du nucléaire, l'émotion dominante était positive. Une force incroyable unissait les participants, tellement présente qu'elle en devenait presque tangible. Nous étions là bien sûr pour crier notre « NON » au nucléaire et à toute sa filière, inhumaine et barbare : qu'il s'agisse de l'extraction des minerais jusqu'à la « liquidation » lors d'accidents nucléaires. Cette industrie - comme tant d'autre - ne respecte pas la vie, ni les humains qui travaillent ni l'environnement.
Main dans la main, unis, reliés.
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Des personnes engagées pour informer ! |
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Communiquer sans relâche sur les effets réels du nucléaire |
La chaîne humaine était un événement avec une portée multiple : affirmer un refus, informer tant ceux présents que les passants et badauds, alerter les médias par une action pacifique... À Opéra, l'ambiance était résolument bon enfant. Je sais que dans d'autres lieux, plus stratégiques, ce fut moins drôle. La présence de CRS probablement plus nombreux que les manifestants donnait le ton : vous êtes gentils mais gardez vos revendications loin du pouvoir !
Ce rassemblement a eu une autre conséquence, bénéfique et surprenante, juste faire du bien. Propager une énergie positive et beaucoup beaucoup de chaleur humaine et d'amitié.
De cette journée, je retiens sa solidarité. J'ai retrouvé des amis de la blogosphère et du groupe des Veilleurs : François, Vincent, Elodie, Leo, Umiko, Aizen... J'en ai rencontré certains "en vrai" pour la première fois. Le moment était fort, sans fioriture, sans masque social. Nous avons eu des échanges qui allaient directement à l'essentiel. C'est reposant et on gagne en quelques heures une amitié qu'il faudrait, dans d'autres circonstances, des mois où des années à tisser.
Un autre Japon et la fin des illusions
Oui cette manifestation pacifique m'a rendue heureuse, m'a donnée une énergie incroyable.
Non, je ne suis pas une grenouille au pays des Bisounours.
Si je ne détaille pas dans cet article de façon factuelle l'horreur de la situation à Fukushima et l'étendue de la contamination au Japon c'est que je suis passée à un autre stade. J'ai fait mon deuil du Japon d'avant le 11/03. Je remarque qu'une partie des Japonais que je côtoie sortent du déni et commencent à parler. Fukushima n'est plus un tabou.
La situation a changé. Le Japon a changé. Je me suis positionnée clairement depuis un moment. Je pense que faire du tourisme dans l'archipel implique de prendre des risques réels pour sa santé. Il est nécessaire d'effectuer ses choix avec lucidité en sachant ce que vit et subit la population.
Dire « aider le Japon » ne signifie rien. Qui aider ? Aider la population sinistrée forcée de vivre dans la contamination avec des enfants qui deviennent malades ? Ou aider les politiques véreux potes avec les industriels comme Tepcto et bien sûr les yakusa, aider ceux qui sacrifient la population locale et sous prétexte de suivi médical l'utilisent comme cobaye (
projet Ethos) ?
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Une journée de solidarité |
Le Japon a toujours eu ses facettes sombres que les "fans" de pop-culture tendent à ignorer gentiment. Les dysfonctionnements de la société sont révélés aux vues de tous ceux un peu curieux. Le Japon a toujours été un pays de contrastes, de lumière et de noirceur. Il est triste de constater que cette crise fait pencher le système politique vers les ténèbres.
Et nous ne sommes pas à l'abri...
Pour aider et s'informer, la page de l'association Kibô promesse :
http://www.kibo-promesse.org
Le site de Pierre Fretet, l'incontournable pour comprendre la situation et suivre l'actu sur Fukushima, en français
http://fukushima.over-blog.fr
Le blog en anglais de Iori Mochizuki, journaliste indépendant qui a quitté le Japon et continue sans relâche d'expliquer et informer :
http://fukushima-diary.com
Les article à lire sur le même sujet chez les copains :
- Umiko et son blog "Le papillon et l'empereur"
http://lepapillonetlempereur.blogspot.fr/2013/03/no-nukes-please.html
https://www.youtube.com/watch?feature=player_embedded&v=egmhj1zlUxM
- François et son blog "Un François au Japon"
http://www.francois-delbrayelle.fr/blog-japon/fr/fukushima-plus-jamais-ca#more-3287
- Le Thon libre chez Dozodomo
http://dozodomo.com/bento/maguro/putain-deux-ans/
Un témoignage de femmes engagées rencontrées durant la chaîne humaine :
http://www.reporterre.net/spip.php?article3953