26 février 2016

Past and Present : juxtaposer avant et maintenant avec le langage universel du dessin



Dans ce petit album étonnant, des dessins minimalistes se juxtaposent en double page avec à gauche, un objet ou une pratique de notre passé et à droite, son pendant contemporain. La bouteille de lait en verre devient le pack en carton, le vinyle devient le lecteur CD, le chef d'orchestre un DJ... En quelques images fortes, l'auteur, Orith Kolodny raconte ainsi l'évolution de nos sociétés industrialisées, sans jugement, sans nostalgie. 

De la dématérialisation au métissage, en passant par la consommation de masse, Past and Present nous montre par des exemples concrets ce qui change et ce qui perdure. Les émotions sont multiples et oscillent entre une surprise joyeuse mais aussi parfois méfiance ou crainte face à certains progrès.

Ce livre à la couverture toute rose, délicieusement surannée, propose un formidable voyage entre maintenant et avant. 

Je pense aussi qu'il peut offrir de belles discussions avec les enfants. Le passage du temps du XIXe au XXIe siècle est instantané, et pourtant tangible. Avec des dessins très simples, graphiques et immédiatement reconnaissables, Orith Kolodny signe un ouvrage d'une grande force. La qualité de la fabrication est au rendez-vous, une habitude pour l'éditeur Hélium. Derrière la jolie jaquette en papier on découvre une couverture en tissus, à l'ancienne.

Ainsi, l'objet livre lance lui aussi un pont entre l'ancien et le nouveau. 




Le site de l'auteur :
http://www.icomeidea.it

23 février 2016

Laisser couler [Mono no Aware Project #18]



A la surface, une feuille surnage
épuisée de l'automne
grignotée par le temps

Elle hésite à sombrer,
en sa piètre compagnie
Fleurs fanées et lambeau de vie
S'accrochent encore.
Entre deux eaux,
Entre deux temps,
Révolu et suspendu,
Décomposition.


Sous la pellicule argenté
Reflet d'un ciel chagrin.

Laisser couler rose, soucis et pensée.
Laisser les couler.
La fontaine continue son chant discret
Sur l'eau, son écho dessine des cercles infinis





21 février 2016

Rideau - paroles pour le disque Sable Mouvant

Rideau


Je me suis installé
À la terrasse d'un café
Un bouquin à la main
Un vague relent de regret
Je sirote du soleil
À la santé d'une vieille

Je regarde les gens passer
Ces quidams si pressés
Je suis là, tranquille
Avec ce goût d'inachevé
Qui embrasse la ville
Persistant comme une migraine
Érodant comme la Seine

Du monde sur les pavés
Je suis relax, no stress
Trop tard pour une messe
Pourquoi broyer du noir
Autant attendre peinard
Que tout soit terminé

Je me suis installé
Dans ce commerce de quartier
Pour le touriste fatigué
En mal d'authenticité
Et l'habitué désabusé
Prêt à se pochetronner

Je vois la foule bigarrée
En bagnole, à vélo, à pied
Avec ou sans papier
Une masse d'humains mouvante
Non identifiée
Certains sourient
D'autres grommellent
Un spectacle infini
Sans cesse se renouvelle

Du monde sur les pavés
Je me sens philosophe
Prêt pour la catastrophe
Pas besoin de s'en faire
Car c'est juste la terre
Qui s'arrête de tourner

Je me plonge dans ces pages
Aux longues lignes lasses
D'avoir été trop lues
Pas de montre au poignet
Pas de boulet prêt à sonner
Du monde dans les rues
Un café noir
Rien d'autre à me soucier
Circuler, plus rien à voir

Deux trois illuminés
Que personne n'a écoutés
L'avaient pourtant prédit
Avec une clairvoyance
De circonstance
C'est pour aujourd'hui
Dans l'indifférence générale
Pas de scandale

Du monde sur les pavés
Je suis relax, no stress
Trop tard pour une messe
Pourquoi broyer du noir
Autant attendre peinard
Que tout soit terminé

Du monde sur les pavés
Je me sens philosophe
Prêt pour la catastrophe
Pas besoin de s'en faire
Car c'est juste la terre
Qui s'arrête de tourner

Du monde sur les pavés
Résigné, j'attends juste
Un épilogue injuste
Parfois les histoires tristes
S'achèvent à l'improviste
Sur le pavé condamné

Tranquille, je me suis installé
À la terrasse de ce café
Profiter de la dernière lumière
D'une dernière bouffée d'air
Avant la der des ders
La fin du monde

Le site de l'artiste :  http://nicolaspabiot.fr

Pour écouter la musique : 
http://www.deezer.com/fr/artist/4158023 
https://soundcloud.com/nicolas-pabiot

Article sur le sujet :
http://etang-de-kaeru.blogspot.com/2013/09/sable-mouvant-voyage-en-eaux-sombres.html

19 février 2016

Love is in the air, chronique d'un New-York suranné en BD, par Lapone et Gihef




Greenwich Village, au début des années soixante. Une époque mythique qui prend vie de nouveau sous le trait d'Antonio Lapone et le récit pétillant de Gihef. Nous suivons les aventures rocambolesque et romantiques de Norman Oakes, un chroniqueur taciturne dont la vie est chamboulée par sa charmante voisine.

L'attirance des contraires et ses petites complications


Norman aime ses habitudes, le calme et la continuité. Il aime que rien ne bouge ou alors par trop vite. Il n'aime pas le bruit, le changement, la modernité et toutes ses petites révolutions qui bouleversent le quotidien. Alors, quand Bebe Newman, hôtesse de l'air et égérie de la PANAM s'installe dans son immeuble, juste au dessus de chez lui, le train-train de Norman vole en éclat. Fêtarde et insouciante, Bebe est un ouragan. A la fois élégante et sans-gène, naïve et volontaire, elle a le chic pour se mettre dans des situations inextricables. Bientôt, le pauvre Norman se retrouve happée dans les histoires abracadabrantes de la jeune femme pour une cohabitation remuante.

En effet, malgré son caractère bien trempée, Bébé demeure foncièrement gentille. Pour mettre à distance un ancien amant jaloux et envahissant, elle décide de feindre une relation avec Norman. Or, tout le monde sait qu'on ne badine pas avec l'amour.

Gihef nous raconte avec humour et distance le quotidien de Norman mais aussi de tout l'immeuble où il vit, dressant un portrait touchant de ses habitants. Du la concierge faussement taciturne à la maman qui gère seule un mouflet casse-pied, en passant par la mamie cougouar et à l'artiste égocentrique et ours, une galerie haute en couleurs de personnages secondaires donne vie à ce New-York au charme suranné

Pour le plaisir !


Le trait particulier de Lapone très anguleux, à la fois simple pour les visages et les silhouettes, et fouillé pour les décors, correspond parfaitement à l'esprit léger et rafraichissant de cette BD. La mise en couleur Anne-Claire Thibault-Jouvray présente des gammes de demi-teintes jamais criardes ni mollassonnes. Elle donne beaucoup de subtilité aux dessins. La narration, impeccablement maitrisée, emmène le lecteur dans une histoire assez téléphonée où pourtant on se laisse prendre au jeu. Les dialogues, fluides et décapants, s'adaptent parfaitement à l'humour de situation.
Love is in the air est parfaitement conçu pour détendre et divertir, sans tomber dans le travers du produit sans âme. La culture et la politique des années 60 est distillée avec soin, de sorte qu'on a quand même envie de ressortir un livre d’histoire sur la période, juste par curiosité. Là où certaines BD sont « fun » sur le moment et s'estompent vite de notre esprit, ce récit-là perdure, une douceur légère et agréable, une bulle de champagne, qu'on a envie de relire, juste pour le plaisir.

Si Love is in the air est un one shot, ce récit s'intègre dans une série «Greenwich Village » avec déjà prévu trois autres tomes qui se dérouleront dans le même immeuble et où on recroisera certains personnages. Si le premier est une comédie romantique légère, le second lorgnera plutôt vers le polar, le troisième vers le conte de Noël et le quatrième aura une dimension plus politique.
Nouveau venu dans le marcher de la BD, les éditions Kennes, surtout connu pour leur catalogue jeunesse, s'engagent sur la durée pour cette série. Un attitude de plus en plus rare qui mérite d'être soulignée.




Interview d'Antonio Lapone à propos de son travail sur Greenwich Village

Le blog d'Antonio Lapone 
http://laponeart.blogspot.fr


La BD sur le site de l'éditeur

17 février 2016

Ero Guro - paroles pour le disque Sable Mouvant

 

Ero Guro


Une silhouette décharnée
La posture voûtée
Comme un tronc torturé
Par le lierre étouffé
Ses moignons de chair
Tous luisants de glaire
Se tordent comme des gros vers

Un corps noueux, mouvant
Aux appendices aberrants
Qui se déplace en rampant
Trop de membres et pourtant
Incomplet, inachevé
Pire qu'un déchet
Un fœtus mort-né

Freaks and monsters
Alone together
In their own little sphere
Of love pain and fear

Devant un parterre extatique
D'individus fort excentriques
Bandant devant l'être canonique
Tels des pervers fanatiques
De toutes ses excroissances
Il virevolte, il danse
Hallucinante transe

La créature gesticule
Comme un gros testicule
Cette vision vous bouscule
Cette image vous accule
Et ses longs bras pendouillent
Son entrejambe se mouille
Se corrode comme de la rouille

Freaks and monsters
Alone together
In their own little sphere
Of love pain and fear

Soudain ses appendices s'agitent
Avec la grâce érotique
D'un poulpe paraplégique
Qui dans un ballet extatique
Vous dégoûte et séduit presque
Une sensualité grotesque
De cette apparition burlesque

Dans ce cirque macabre
Où brillent mille candélabres
Gît la parodie sans palabre
D'un créateur de marbre
Indécence d'une forme
Que la nature déforme
Une masse informe

On mérite ces parasites
Nos vices s'immiscent
Glissent dans les interstices
D'une société trop lisse
C'est l'espèce endémique
D'un cauchemar cyclique
Elle vous file la trique

C'est l'esthétique
De la panique !



Le site de l'artiste :  http://nicolaspabiot.fr

Pour écouter la musique : 
http://www.deezer.com/fr/artist/4158023 
https://soundcloud.com/nicolas-pabiot

Article sur le sujet :
http://etang-de-kaeru.blogspot.com/2013/09/sable-mouvant-voyage-en-eaux-sombres.html

14 février 2016

Factice - paroles pour le disque Sable Mouvant

Factice


Ton âme meurtrie se délite
Sans faux-semblant
Sans geste aguichant
Comme un aimant parasite
Ton âme-lumière souille
Ton âme-phare rouille
Attire ceux en mal d'amour
En mal d'aimer

Ta fragilité casse la distance
Rend vulnérable la cuirasse
Ramollit la carcasse
Gagne la confiance
S'immisce dans l'intimité
Refuge pour un animal blessé
Abîme le protecteur
Abîme le sauveur

Une image, un reflet
Je tends le doigt
Sous l'illusion factice
L'ombre de toi

Tombé amoureux d'une ombre
Le plus valeureux guerrier
Désarmé par ta sincérité
Dans ton mercure, il sombre
Se noie dans ta pénombre
La source létale du mal
Effilée, cette lame
Transperce cœur et âme

Une image, un reflet
Je tends le doigt
Sous l'illusion factice
L'ombre de toi

À ses blessures béantes
Abreuve son empathie
Lape la souffrance
Son innocence bénie
Pulsation, résonance
Bat la mesure de votre amour
S'abat sur lui comme une fièvre

Désespoir ravageur
Drogué à ta bouche
Maladie honteuse
D'être amoureux d'une ombre

La réalité distordue
D'un être qui n'existe pas
Cache un fantôme malingre
À demi disparu
L'ombre de toi
Dissimulé
En filigrane, perdu

Une image, un reflet
Je tends le doigt
Sous l'illusion factice
L'ombre de toi



Le site de l'artiste :  http://nicolaspabiot.fr

Pour écouter la musique : 
http://www.deezer.com/fr/artist/4158023 
https://soundcloud.com/nicolas-pabiot

Article sur le sujet :
http://etang-de-kaeru.blogspot.com/2013/09/sable-mouvant-voyage-en-eaux-sombres.html


9 février 2016

Tadaaam ! Un blog tout neuf !





J'en parlais depuis des mois et j'avais la flemme pour m'y coller. J'en parlais depuis des mois sans avoir les compétences. Contempler le travail à accomplir me fatiguait d'avance. Pourtant, c'est fait !
Avec de l'aide et beaucoup de prises de tête de mon coté, enfin... l'étang se transforme !


Les nouveautés 


Pour les moins observateurs ou les nouveaux, le blog est rénové avec :
  • Une meilleure visibilité pour les articles sur la page d’accueil
  • L'apparition d'un menu pour ranger un peu le bazar :
    •  mes découvertes où je vous parler de bouquin avec ou sans images, d'expo
    • un espace d'expression où parfois je raconte ma vie, je déclame de la poésie et je prend des photos
  • Le-dit menu "se colle au plafond" quand on fait défiler le texte vers le bas
  • Une refonte totale des libellés (qui était nécessaire pour tout ranger)
  • La mise en place de pages d'index pour mes p'tits projets d'écritures et de photos
  • Un nettoyage de la colonne de droite avec un mot de bienvenu
  • Un formulaire de contact

Outre un dépoussiérage graphique par Virginie Blancher qui s'occupe du design du blog depuis sa création, je voulais surtout modifier l'ergonomie et la structure. Je tenais à séparer les articles journalistiques de ceux plus personnels. Il me paraissait nécessaire de dissocier ces deux activités, d'autant que j'ai comme objectifs d'avoir une nouvelle éditée en 2016 (on peut rêver!).



Se faire aider par des pro, le remède aux migraines et la satisfaction garantie !

Toute ces modifications techniques ont été réalisée par Catherine Sûr, graphiste et web-designeuse. Elle propose sur son blog "Lady Bird Red" de nombreux tutoriels gratuits de personnalisation de blog pour la plate-forme blogger. 
Si, comme moi, vous êtes 1) des quiches 2) des flemmards (bref, des quiches flemmardes), vous pouvez faire appel à ses services moyennant rémunération. Ses tarifs sont vraiment raisonnables. Elle peut se charger de tout l'habillage du blog et de la mise en place.

Moi, j'étais la cliente pénible. J'avais déjà une graphiste attitrée (ouais, ça pète) dans la poche et je ne voulais que des modifications de code à la noix. L'intégration est la partie la moins fun de ce boulot car la mois créative. En plus, comme tout client pénible, je ne savais pas trop ce que je voulais ! Même si j'avais deux modèles en tête : le blog du Papillon et l'empereur pour l'organisation et de Hibi no Yorokobi pour la simplicité visuelle et sa lisibilité.

Après des jours à changer les libellés de mes centaines d'articles et à me féliciter d'être si peu assidue (ça faisait moins de taff), à tergiverser sur tel ou tel détail, je me suis décidé et Catherine a fait la mise en œuvre. Inutile de vous expliquer à quel point le résultat est sublimissimement génial, vous l'avez sous les yeux.

Plus sérieusement, passer par Catherine m'a éviter beaucoup d'énervement et de temps perdu. En plus, elle m'a proposé des options auxquelles je n'aurai jamais pensé. Normal, c'est son boulot !

Mon blog est totalement bénévole, il ne me rapporte pas un radis et n'est pas sponsorisé. Pourtant, au bout de cinq ans, il est devenu plus qu'un simple loisir. Je trouve ici un espace d'expression libre et aussi la possibilité de réfléchir à voix haute, de me motiver pour des projets artistiques, de tester, de rencontrer d'autres humains. 
Je pouvais donc m'offrir ce lifting afin que le blog reflète exactement ce que je souhaite. C'est un investissement heureux. J'espère que cette nouvelle interface incitera certains d'entre vous a aller fouiller dans les archives, maintenant organisées.

Bonne lecture !



Photos prise à Nice et à l'île St-Marguerite (Cannes)

8 février 2016

Trans - paroles pour le disque Sable Mouvant

 

Trans


Tu te lèves le matin
Et dans ta salle de bain
Toujours les mêmes gestes
Comme les cernes qui restent
Dans la pénombre, se laver
S'habiller sans se toucher
Et se supporter
Encore une journée à se supporter

Tu te lèves le matin
Et dans ta salle de bain
Tu fuis ta sale image
Ravales les relents de rage
Tu effleures de ton pouce
Ta mâchoire trop douce
Ces lèvres trop pleines
Pour vomir ta peine

Sombre et grise mine
Que la routine lamine
Se réfléchit dans le miroir
L'objet abject de désespoir

Sur un corps inadéquat
Son poids alourdit tes pas
Sur un corps inadéquat
Son poids alourdit tes pas

Tu te lèves le matin
Et dans ta salle de bains
La viande sur tes os
Pend tel un lourd fardeau
Les excroissances de ton torse
Siphonnent ta force
Juste avant de sortir
Tu te pares d'un sourire

Tu te lèves le matin
Et dans ta salle de bains
Les rêves d'une autre habitude
Apportent leurs vicissitudes
Tu effleures de ton pouce
Ta mâchoire trop douce
Ces lèvres trop pleines
Pour vomir ta peine

Sombre et grise mine
Que la routine lamine
Se réfléchit dans le miroir
L'objet abject de désespoir

Sur un corps inadéquat
Son poids alourdit tes pas
Sur un corps inadéquat
Son poids alourdit tes pas

Migrer
Changer
Lâcher cette prison de chair
Partir ailleurs
Un autre organisme
Pas être un autre
Être juste toi. Juste soi

Routine déroutante
Pas de miroir
Pas de reflet
Ne pas croiser les regards
Trop lourds, si lourds
Tous les jours le même poids
Le poids de toi
Ça fait si mal
Le poids de l'âme, une plume
Le poids du corps, une enclume

Continuer
Endurer
Tu voudrais migrer
Continuer
Endurer
Tu voudrais migrer
Te transformer 


Le site de l'artiste :  http://nicolaspabiot.fr

Pour écouter la musique : 
http://www.deezer.com/fr/artist/4158023 
https://soundcloud.com/nicolas-pabiot

Article sur le sujet :
http://etang-de-kaeru.blogspot.com/2013/09/sable-mouvant-voyage-en-eaux-sombres.html

Sable mouvant - paroles pour le disque éponyme

 

Sable mouvant



Je ne veux pas choisir
Suivre toujours et sans saisir
Que la vie, ça se mérite !
Ni juste ni pratique
Ces milliers d'actes manqués
Se mêlent aux regrets
Plombent mon avenir

J'veux pas choisir,
Suivre toujours et sans finir
S'engager qu'à moitié
Pour jamais être blessé
Velléitaire de cœur
Responsable de rien
À peine humain

Tendre la main,
Jamais bien loin
Viser la facilité
Déjà prémâchée

Sable mouvant

J'veux pas choisir
Suivre encore et sans désir
Se plier à la réalité
Sans combattre, juste oublier
Qu'à l'intérieur on aspire
À des hauteurs
P'être au bonheur

J'veux pas choisir
Ne pas penser à l'avenir
Éviter tous les heurts
Ignorer même ses peurs
Coller à la normalité
Mon amie la facilité
Et se détruire

Tendre la main,
Jamais bien loin
Viser la facilité
Déjà prémâchée

Sable mouvant




Le site de l'artiste :  http://nicolaspabiot.fr

Pour écouter la musique : 
http://www.deezer.com/fr/artist/4158023 
https://soundcloud.com/nicolas-pabiot

Article sur le sujet :
http://etang-de-kaeru.blogspot.com/2013/09/sable-mouvant-voyage-en-eaux-sombres.html

6 février 2016

Papier - paroles pour le disque Sable Mouvant

Papier


Ma vie c'est du papier
Du papier qui s'accumule
Du papier qui pullule

Facture, Assedic
Gaz, électricité
Télécom, Internet
Impôt et publicité

Du papier

Des papiers de l'administration
Si abscons
S'empilent sur le bureau
Comme des parpaings de béton
Se reproduisent dans mon dos
Se sédimentent doucement
Comme dans un lac, tout au fond
S'entassent les limons

Du papier

Et des tours de bouquins
Comme la tour de Babel
Qui s'amoncellent
Comme la Bibliothèque nationale
Avant de se prendre une mandale
Et de s'écrouler sur le parquet

Des tours de lecture en suspens
Et encore d'autres que j'attends
Des tours de lecture à refaire
Des tours de lecture déjà faites
Des tours de papier
Science-fiction et polars
Dictionnaires et romans de gare

Et des livres illustrés
Avec des milliers de cases
Et des milliers de phrases
Des dessins colorés
Des traits à l'encre de Chine
Comics mangas BD
Encore du papier
Toujours du papier

Ma vie c'est du papier
Mes loisirs, du papier
Pour voyager sans bouger
Pour oublier la réalité

Du papier virtuel
Des fichiers, des e-mails
Du papier fiduciaire
Qu'on file à la boulangère
Du papier, du papier

Ma vie officielle c'est du papier
Une existence de papier
Du papier

Et quand je caresse
Le bois de mon étagère
Dessous il y a encore, du papier, du papier

Un jour je voudrai tout jeter
Tout brûler, tout couler
Laisser derrière moi
Tout ce papier
Tout ce papier
Si lourd

Cramer l'Amazonie
Frire l'Indonésie
Sans oublier le Massif central
Et toutes les forêts domaniales
Éradiquer la source du Mal

Tous les champs de papier
Les dévaster !
Les atomiser
Jusqu'au dernier !

Quand en moi les histoires dansent
Une kyrielle de mots s'affolent
Je n'ai alors qu'une envie folle
Les coucher sur le papier

Je sais que pour les apprivoiser
Il faut du papier, du papier



Le site de l'artiste :  http://nicolaspabiot.fr

Pour écouter la musique : 
http://www.deezer.com/fr/artist/4158023 
https://soundcloud.com/nicolas-pabiot

Article sur le sujet :
http://etang-de-kaeru.blogspot.com/2013/09/sable-mouvant-voyage-en-eaux-sombres.html

4 février 2016

Bob - paroles pour le disque Sable Mouvant

 

Bob


T'as un certain talent
Pour les emmerdements
T'es construit pour durer
La baston et cogner

T'es pas là par hasard
Un tantinet casse-couilles
T'es jamais en retard
Quand il s'agit d'embrouilles

Résiste à tout
Même à l'atome
Même au sarcome

Résiste à tout
Même à l'atome
Même au sarcome

Toi, plus tard
Tu s’ras cafard

T'as un certain talent
Pour les emmerdements
Des gus à dessouder
T'es là pour nettoyer

Et dans tout ce bazar
Des biftons plein les fouilles
Le voilà qui s'barre
Vers de nouvelles magouilles

Résiste à tout
Même à l'atome
Même au sarcome

Résiste à tout
Même à l'atome
Même au sarcome

Toi, plus tard,
Tu s’ras cafard

3 février 2016

« Sous le lit » une BD sensible et sensuelle de Monsieur Q




"Sous le lit" est tranche de vie d'une jeunesse engluée dans une adolescence qui n'en finit pas, qui tente de devenir adulte malgré la rugosité du monde et son apparente morosité. L'intrigue se construit autour d'un sujet épineux, un l'accident bête et potentiellement mortel : la relation sexuelle ou tu oublies la capote. Cependant, il s'agit plus d'une BD qui parle d'amour sous toute ses formes : dans le couple, entre ami, entre parent et enfant.

Le préservatif préserve de tout... y compris des crises d'angoisses


Valentin a un vingtaine d'années ; l'âge où on sait que les monstres sous le lit n'existent pas mais que le monde est peuplé de menaces bien pires que celles imaginées par nos peurs de l'enfance. Pourtant, on a encore toute la fragilité et les appréhensions d'un oisillon, doutant de sa capacité à prendre son envol. Et un écart fâcheux, un petit accident, risque de faire voler en éclat les belles promesses d'avenir.
Jeune étudiant, homosexuel, Valentin a une aventure lors d'une soirée arrosée. Le lendemain, il ne se souvient plus si le préservatif était de la partie. Suit alors une décente dans l'angoisse de la contamination, l'incapacité d'affronter le test sanguin, les mensonges à Émilie, sa meilleure amie, les silences avec sa mère qui ignore tout de l'attirance de son fil pour les garçons.

Timide et introverti, il se planque sous le lit, avec les monstres et les moutons de poussière. Il tente de fermer les yeux, d’ignorer très fort la réalité, mais personne n'est dupe et surtout pas Émilie qui le houspille. Petit à petit, il accomplira le chemin vers le cabinet du médecin, le chemin vers l'adulte, vers une acceptation profonde de ce qu'il est et de celui qu'il veut montrer au monde.

Le talent n'attend point le nombre des années


Le trait hésitant, un peu brouillon de Monsieur Q (Quentin Zuttion) retranscrit les émotions et les conflits intérieurs avec tant que justesse qu'on se sent happé par la terreur de Valentin. Avec un découpage soigné qui laisse la place au passage du temps et aux petites choses de la vie, le récit progresse tout en douceur. La construction narrative est impeccable avec un choix judicieux du flash back qui donne au lecteur la certitude, dès les premières pages, que Valentin pourra dépasser ses craintes. Les représentions graphiques de la panique et les différents choix dans le traitement du dessin, en fonction du bagage émotionnel des scènes, dénotent d'une grande maturité artistique pour ce jeune homme.
Les dialogues sont fluides, dans l'air du temps, parfaitement compréhensibles (même quand on a deux fois 20 ans!). Le rythme est parfait : une alternance entre le quotidien et les ruptures graphiques quand les masques tombent et que Valentin cède à ses craintes.
Loin des stéréotypes et des discours moralisateurs, voici une BD en forme d’instantané sur une génération de nouvelles pousses qui rêvent toujours de libertés. Le sujet était casse-gueule, surtout quand on connait les statistiques sur la progression en recrudescence du SIDA et des MST. Pourtant, Monsieur Q le traite directement, avec sincérité et évitant l’écueil du discours lisse de campagne de prévention.
Il nous parle des difficultés de la vie quand on est hors des clous de la norme hétérosexuelle, nous parle de la douleur de grandir, d'être soi-même. Car il s'agit avant tout d'une histoire intime sur le passage de la fin de l'adolescence à l'age adulte, sur la transformation en un individu responsable et pourtant, toujours fragile et faillible qui veut être aimer.
Un seul bémol : l'omniprésence de la cigarette parce qu'il fallait bien que je trouve un truc négatif.

Sous le lit est une BD intelligente qui s'adresse aux curieux de l'Humain, qu'on soit jeune ou moins jeune, hétéro ou pas dans les cases. Bien sur, ce livre rappelle aussi que la capote évite non seulement de chopper et transmettre des saloperies mais surtout, qu'elle garantie - un peu - la quiétude de l'esprit.



Cette BD est sortie chez un petit éditeur spécialisé LGBT "Des ailes sur un tracteur". Sa diffusion est peut-être assez confidentielle. Le plus simple est de vous rendre sur le site de l'éditeur :

http://www.desailessuruntracteur.com/NOUVEAU-Sous-le-lit--la-premiere-BD-de-MR-Q--une-histoire-d-amour-et-d-amitie_a166.html