La parenthèse s’étiole. On nous rebat les oreilles sur le monde d’après,
tout pareil que celui d’avant, en pas mieux. Fatiguée, je me contente
d’écouter une autre musique, celle du vent et des oiseaux, de nouveau
assourdie par le retour des bouchons sur le périph. Les frontières sont
fermées et le tourisme de masse laisse encore tranquille la capitale ;
festive, elle, rattrape avec frénésie les semaines de frustrations. Des
masques dans le caniveau, des terrasses bondées et dans les restaurants,
une distance de sécurité. Une table sur deux, voilà qui rend les repas
plus tranquilles à mon goût. Les musées commencent à rouvrir, sur
réservation. Voilà donc une occasion de profiter avec calme de lieux à
l’accoutumée si bondé que leur accès est pénible lorsque, comme moi, une
foule trop dense, gâche le plaisir jusqu’à l’angoisse. Et puis, je vais
quitter Paris.
Comme chacun, j’accumule les « un jour ». Je le visiterai bien « un
jour ». J’irai « un jour »… Le décompte est lancé et le sac à « un
jour » qu’on aspire tous sans fond, s’amaigrit. Alors, avec une amie,
nous avons décidé d’un programme de rattrapage, de faire ces promenades
sans cesse repoussées. Nous avons commencé par le Château de Versailles,
lieux bling bling où je ne me suis rendue que quelques fois, pour voir
de l’art contemporain (comme l’expo Murakami en 2010)
ou des spectacles en plein air. Si l’architecture ostentatoire et
surchargée me laisse impassible, déambuler dans la galerie des glaces
avec une poignée de visiteurs m’a impressionnée. Le faste du lieu prend,
dans le calme, une autre ampleur. Les contraintes sociales de la cours
et la nécessité d’un décorum rigide me paraissent un carcan bien
insupportable. Nous nous arrêtons pour observer les détails de tentures,
des tapisseries, les dorures des meubles, les poignées de portes, les
pieds des fauteuils. Personne pour nous bousculer ou nous houspiller. Le
Grand Trianon, encore moins animé, est un réel plaisir. Là, fini les
fresques au plafond et l’omniprésence de l’or. Le contraste entre
l’architecture et le mobilier me séduit.
Mais la vraie joie se trouve au jardin.
Certaines
parties ne sont pas ouvertes et partout les jardiniers s’affairent,
surpris presque de voir déambuler les visiteurs. Lorsque nous nous
enfonçons dans le parc, nous marchons, seules dans les allées proprettes
d’arbres au carré. Le hameau de la Reine, charmant, et sa ferme de
poupée, abrite une basse-cours exotique où poils et plumes
resplendissent. Les bestioles nous observent placides. Les chèvres
viennent se faire gratte. Les poules se coursent. Les lapins mastiquent.
Il existe un parcours recensent les arbres remarquables. Vieux gardiens
du parc, ils ont dû voir défiler de sacrés loustics, entendre complots
et remarques idiotes, en toutes les langues sans compter l’activité dans
les bosquets.
Marcher, observer écorces et fleurs ; se poser pour gribouiller et boire un jus d’orange fraîchement pressé. Quelques familles, quelques personnes âgées, quelques Anglais. Nous sommes arrivées à 10 h et nous partons à 17 h, fourbues mais joyeuses. De l’or et du vert au fond des prunelles, l’écho de nos échanges tantôt philosophiques tantôt stupides mais si drôles, gonfle nos cœurs. Une plume dans le sac, deux dessins dans mon carnet. C’était une belle journée.
Pour voir des photos de l’intérieur du château, c’est sur en public sur facebook
Coucou Marianne !
RépondreSupprimerC'est intéressant de t'entendre parler du Château de Versailles et ses jardins, après la Covid19, et je dirais même "pendant", parce que ce virus est toujours là.
Tu as raison de ne pas garder pour demain ce que tu peux faire aujourd'hui. C'est souvent la peur du lendemain qui nous freine et nous pousse au renoncement. Mais le temps passant, nous fait comprendre qu'il faudrait plutôt s'affranchir de cette sorte de peur.
J'adore regarder tes dessins d'après tes observations. Ils referment un charme que les photos ne peuvent pas transmettre. Une sorte de rêve ^o^*❀•.¸¸♪ et tu finis par dire que "... C'était une belle journée" !
N'est-ce-pas merveilleux ?
Hélas, oui, le virus est toujours là, même si parfois, à voir le nombre de personnes sans masques dans les lieux fermés à Paris, on a l'impression qu'il a disparu.
SupprimerMon avenir est très flou, je fonctionne donc à très court terme. Cela m'évite de paniquer et ainsi, je m'autorise à apprécier le présent ! J'essaye de cultiver ma confiance et de garder espoir. Dessiner est une action justement qui m'aide beaucoup. Je me concentre sur ce que je vois, sur ce que la main arrive à transcrire. J'ai en projet d'apprendre le crochet mais je n'ai pas encore eu le courage et la tranquillité d'esprit de passer le pas. J'espère pouvoir me lancer d'ici la fin de l'été.