11 octobre 2012

Burlesque Girrrl : de la zic, des pin'up, des vieilles caisses et l'art d'émouvoir




Illustrateur à la plume sensible et à l'encre magique, François Amoretti se lance pour la première fois dans l'aventure d'une BD qu'il dessine et scénarise. Il collabore avec Nephylia pour la mise en couleur délicate. Le résultat est un album hors norme, une histoire R'N'R et tendre, à la fois lumineuse et terrible.

Levée de rideau


Cette histoire (prévue en deux tomes) démarre en fanfare avec des musiciens qui chauffent les planches. S'amorce alors un tournant dans la vie des membres. Le groupe est à l'orée d'un avenir encore flou sous le signe du succès, à moins que ce ne soit des augures peu cléments qui influencent leur destin...

Peter a tout pour être heureux. Il vit pour la musique, son groupe et surtout, Violette, sa compagne et sa muse. C'est une jeune femme plantureuse, indépendante et bien dans sa peau qui a de multiples talents. Chanteuse occasionnelle, elle est contrebassiste, modèle et effeuilleuse burlesque. Elle est surtout vivante, débordante d'énergie, confiante et motivée. Alors quand un producteur s'intéresse au groupe, l'avenir semble soudain plus radieux. La fin des galères et les espoirs de réussite gonflent les cœur et les orgueils.

Mais la vie n'épargne ni les idéalistes ni les poètes...

Violette est un de ces personnages féminins magnifiques, réalistes et complexes comme on en croise rarement dans la BD. Loin des stéréotypes de bimbos ou de nanas dopée à la testostérone, elle est une héroïne sensible et complexe, à la fois hors-norme et pourtant si commune dans sa féminité. Elle croit en Peter, non avec un amour romantique mièvre et aveugle mais avec l'assurance d'un roc. Elle sait qu'il est exceptionnel, qu'il mérite de réussir. Sa force et sa conviction suffira-t-elle pour deux ?

Des noirs, des mots et des demi-teintes


Si j'ai toujours apprécié le travail d'illustration très jeté, énergique et sensible de François, je ne connaissais pas ses talents de scénariste. Burlesque Girrrl bénéficie non seulement d'une belle histoire - du point de vue romanesque - mais aussi d'une narration fluide. La qualité des dialogue et la lisibilité du storyboard sont indéniables.

Le découpage alterne des planches classiques, avec des casses bien rangées et son quota de hors-cases pour garder de la dynamique, avec des pleines pages d'illustrations proprement hallucinantes. Ayant eu le plaisir de voir les originaux lors d'une expo, je suis soufflée par la précision du trait et surtout le juste équilibre entre l'amas de détails et la grande lisibilité du dessin. Il y a à la fois plein de petites choses cachées à découvrir, et en même temps, on se prend le propos et la ligne générale en pleine poire.
François arrive à synthétiser des influences graphiques très variées pour se les approprier en un style propre de plus en plus affirmé. Aujourd'hui, son trait est reconnaissable entre mille, et au pire, il y aura toujours un poulpe-fraise pour se glisser dans un coin et vous rappeler qui est l'auteur !

Enfin, la mise en couleur de Nephyla est magique ! Elle sublime le dessin, affine les ambiances sans jamais trahir le trait.



De la fascination des marges...


Cet album original oscille entre une chronique du quotidien d'artistes au bord de l'inconnu, avec un soupçon d'action et de romance. L'étrangeté tient au milieu décrit, marginal : tatouage, vielle voiture, musique psychobilly (un genre dont j’ignorais jusqu'à l’existence avant d'ouvrir le livre) piin'up et ambiance visuelle des 50's

Le personnage de Peter prend aux tripes. Loin des "emo" fatigants ou des beaux gosses talentueux qui se torturent inutilement, Peter est poignant. Ses démons intérieurs crédibles et terriblement humains. Il est dépassé par ses aspirations de créer et pas les peurs qui les accompagnent, rampantes et sournoises. Plus il ravale ses émotions, plus il étouffe leurs violences, plus il est dévoré. Il est celui qui m'émeut le plus, celui qui fait que Burlesque Girrrl passe du statut d'histoire sympa et de qualité à autre chose, beaucoup plus précieux, beaucoup plus intérieur.

Et puis, ce qui rend aussi cette BD tellement attachante, c'est sa dimension très personnelle. François parle de sa tribu, de ses passions. Il connaît ces personnes. Lui-même féministe engagé, il a toujours été très éclectique dans ses goûts et ne se contente jamais de rester dans les grands courants. Ses précédentes BD influencées par son amour pour le Japon l'attestent : de la culture japonaise oui, mais pas de manga, pas de phénomène à la mode futiles et fluctuants, pas d'images faciles. François se tourne vers la lisère, vers des eaux plus troubles, plus profondes.

Pour entraîner les lecteurs dans son univers, la BD est agrémentée de page de témoignages et de magnifiques illustrations faites par des tiers qui rivalisent de talents (Lionel Richerand, Lost Fish, Tony Sandoval...)

François Amoretti © ANKAMA / Alex O’Toole

Burlesque Girrrl est donc un album qui allie le fond et la forme, le trait et le mot. Il réussit ce tour de force de s'adresser à des personnes totalement différentes, sans considération de sexe, d'âge ou de milieu. Si vous êtes curieux, attiré par l'étrangeté, l'altérité sans préjugé, alors vous serez séduit.
J'avoue, ma critique est biaisée, j'aime le bonhomme !
Alors, pour vous faire votre opinion, je vous encourage vraiment à feuilleter la BD et plus si affinité.

Le site de l'auteur :
http://francoisamoretti.blogspot.fr/
Sa page fb :
https://www.facebook.com/pages/Fran%C3%A7ois-Amoretti/239767699378895

Le site de Nephyla :
http://nephyla.deviantart.com

Planches originales à vendre à la galerie Arludik :
 http://www.arludik.com/index4.htm

5 commentaires:

  1. oh ça donne vraiment envie de lire cette bd, merci pour ton avis :)

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  2. J'aime beaucoup le travail de François Amoretti et le bonhomme est sympa et accessible pour l'avoir croisé dans un salon BD.
    Il avait revisité Alice aux Pays des Merveilles et le Petit Chaperon Rouge dans son style si particulier !
    Très belle critique !
    Bravo !

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  3. Je suis aussi une archie fan de Amoretti... donc je ne peux être que d'accord avec ta critique :D

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  4. ça a l'air trop classe cette BD! J'en lis pas beaucoup mais ça me tente bien pour le coup...<3 Figure toi que je suis assez fan de psychobilly depuis un moment! ça donne envie de danser le houla oop. ^^

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  5. elle a l'air chouette cette bd dis donc
    les dessins et ton articles donnent très envie de découvrir

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Il s'affichera un peu plus tard, après sa validation.

Marianne