17 juin 2016

Hudros de Patrick Rimond, photos de béton et d'eau




Je vous parle aujourd'hui d'une pépite de bleu, de vert et d'ocre : un livre de photographie au format paysage. Il nous fait voyager dans des paysages étranges, totalement déroutants. Pourtant, il s'agit de clichés pris dans le sud de la France !

L'exotique du paysage commun


Sous le titre mystérieux d'Hudros sont assemblées trente photographies de Patrick Rimond sur un projet particulier. Il a travaillé pendant plusieurs mois avec comme sujet les canaux qui partent de la Durance et du Verdon pour alimenter les villes de Marseille et Toulon. Il propose sa vision, onirique et abstraite, de ces lieux d'eau, de béton et de pierre, noyés sous un soleil écrasant. La lumière crue découpe les arrêtes vives des édifices et trace des ombres tranchées. La couleur de l'eau oscille entre un gris laiteux et un bleu-vert transparent, presque tropical. Parfois impénétrable, solide, d'autre fois si claire que sa profondeur semble nous purifier, elle change sans cesse alors que le paysage, lui, demeure parfaitement figé dans la rigueur utilitaire d'une construction humaine.



Hudros est mot grec désigne l'hydre, le serpent mythologique avec sept têtes qui se régénèrent et se multiplient une fois tranchées. Ici, c'est la seule lame est de lumière. Elle découpe les bords des canaux dans des compositions toutes en rectitudes et en lignes droites, tantôt brisées pour tracer une géométrie mystérieuse, tantôt infinies, fuyantes à l'extérieure du cadre. Le serpent d'eau dans un camaïeux de bleu se faufile de page en page. Parfois, une courbe se glisse dans une image, pour casser le rythme. Elle évite la monotonie et éveille l’œil dès qu'il commence à s'habituer, à lire des récurrences. Entre les ocres, les gris et les bleus, des touches de vert-jaune d'une végétation méditerranée apporte une touche de vie à ce minéral.

Poésie de l'image et rencontre avec le regard de l'autre


Patrick Rimond propose un voyage dans un quotidien qui pourrait paraître inintéressant et morne. Son regard le sublime, le transforme en un ailleurs exotique, aux dimensions multiples, fantastiques. Il invite à une contemplation où on perçoit en contre-point du silence, le chant discret de l'eau et son mouvement fluide.


Voici un livre de très belle facture, édité par la petite maison Iki que j'apprécie déjà pour sa collection du Pont Rouge. Les livres de photographies sont, comme la poésie, souvent boudés par les lecteurs. Pourtant, quand il s'agit d'un ouvrage qui correspond à notre sensibilité, on peut sans cesse y revenir au fil des années. Intemporel, ils sont autant de fenêtre à la fois sur l'extérieur à travers les yeux d'autrui mais aussi sur notre monde intérieur. Quand un tel bouquin me plait, j'ai l'étrange impression qu'il rentre en résonance avec une partie de moi, qu'il m'invite à prendre aussi mon appareil photo et ma plume, qu'il m'invite à épanouir ma créativité, à affuter mon regard et à me tendre vers l'autre pour rencontrer sa différence. 




En feuilletant pour la première fois Hudros, j'ai immédiatement été séduite par sa proposition artistique, sa façon de montrer ce paysage, les angles choisis, le travail de couleur, entre uniformité et contraste.
Vous laisserez-vous séduire ?

Site de l'auteur :
http://patrickrimond.com/hudros.html
Information sur le livre (feuillable) :
http://lepontrouge.net/?page_id=15

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Marianne