17 décembre 2014

Tokyo infra-ordinaire : la poésie du métro japonais par Jacques Roubaud


Au milieu des années quatre-vingt-dix, le poète Jacques Roubaud, membre de l'Oulipo, a promené son regard perçant à Tokyo, depuis la ligne circulaire de métro de Yamanote qui contemple la ville de haut. Un recueil de ses écrits vient d'être réédité chez le Tripod, une maison indépendante qui soigne particulièrement la maquette de ses ouvrages.

Tokyo infra-ordinaire  est d'abord un objet livre, proche de l'objet d'art : il existe en effet quatre couvertures qui sont chacune des propositions nées suite à la lecture du texte par quatre artistes différents. J'ai choisi celle intitulée « jardin » qui a capturé mon attention dans une petite librairie du XVIIIème où j'étais fermement décider à ne pas dépenser un centime...

Le texte est de plusieurs couleurs et avec des indentations variables qui respectent scrupuleusement la mise en page du manuscrit originale. La poésie est dans les mots mais aussi dans leur agencement, leur teinte, leur position


Si vous n'avez jamais lu de poésie contemporaine, abandonnez toute idée préconçue.  Ici, point de rime et de vers qui obéissent à des règles ancestrales. Laissez vous emmener par la magie des phrases et la force des images. En lisant Tokyo infra-électrique je me suis trouvée transportée dans la Yamanote. Son bercement doux, les vibrations, le flux d'humain, les petites musiques spécifiques à chaque station, le balancement des accroches en plastique qui pendent des barres de métal.


Jacques Roubaud nous propose un voyage ordinaire dans un quotidien du Japon que les touristes avides d'exotismes tendent à remarquer avant d'aussitôt d'oublier les détails au profit de lieux et d'impressions plus dépaysantes, plus grandioses. Pourtant, ce sont ces minuscules différences qui font toute l'originalité et l'âme d'un endroit. Jacques Roubaud s'attarde sur le superflu, le commun, le terne.


Il soumet son regard à ses propres règles de composition qu'il définit (invente) en début d'ouvrage comme, par exemple, de composer un poème entre deux stations de métro quand la rame roule. Il nous parle de ses découvertes dans la boutique Toto, le célèbre fabriquant de toilettes, des horloges Daimiyo qui mesurent le temps en fonction de la durée du jour et dont les heures ont une durée fluctuante, il rencontre une coccinelle passager clandestin... Autant de moments et d'anecdotes drôles, tendres et surprenantes de ce Japon qui se vit et se contemple plus qu'il ne se visite.

Difficile de résumer cet ouvrage tant il est à la fois hétéroclite et homogène. Il rassemble des morceaux de textes à l'ambiance et au style très différents pourtant, il s'inscrit dans une continuité de regard et d'observation.
Un livre de poésie qui séduira les amateurs du genre mais aussi les amoureux du Japon qui ont envie de découvrir Tôkyô d'une autre façon.



Une série de vidéos avec Jacques Roubaud :
https://www.youtube.com/watch?v=nRAd9a411p0
https://www.youtube.com/watch?v=LUxcuFkrBj8
https://www.youtube.com/watch?v=C2DeCgnO-is

La fiche du livre chez l'éditeur :
http://le-tripode.net/livre/jacques-roubaud/tokyo-infra-ordinaire

La biographie de Jacques Roubaud :
http://fr.wikipedia.org/wiki/Jacques_Roubaud

3 commentaires:

  1. La poésie m'est un peu étrangère, cependant votre proposition est bien tentante...

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  2. La poésie, à la différence d'autres genres littéraires, se picore plus qu'elle se lit. Pour moi, elle est partout dans nos vies, pour peu qu'on prenne le temps de contempler le mode avec enthousiasme et curiosité. Elle souffre cependant d'une piètre réputation et les ouvrages de poésie sont les moins vendus.

    Voici un autre livre que j'aime beaucoup et qui est un plus classique dans sa démarche :
    http://etang-de-kaeru.blogspot.fr/2011/06/les-quatre-saisons-kyoto-un-miracle.html

    Sans la poésie, le monde serait bien triste...

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  3. Tres envie de me procurer ce bouquin à cause de toi :)

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Il s'affichera un peu plus tard, après sa validation.

Marianne