9 janvier 2015

Les Destructeurs : un projet BD courageux et novateur à soutenir !

Les Destructeurs, la prochaine BD de François Amoretti


Aujourd'hui, grâce au web, nous pouvons tous soutenir les artistes qui nous plaisent. Nous pouvons leur acheter directement leurs œuvres (peinture, roman, BD, musique...). Nous pouvons aussi les aider à mener à bien leur projet avec un financement participatif. Aujourd'hui, nous sommes tous des mécènes potentiels, à la mesure de nos moyens. Voici Les Destructeurs, le dernier projet BD d'un auteur talentueux et expérimenté, François Amoretti, que j'apprécie énormément.

1 Qui est François Amoretti ?


François est d'abord un homme amoureux. Amoureux de sa charmante compagne, la piquante pin-up Nella Fragola. Amoureux du dessin, des encres, des mondes mystérieux et obscurs, amoureux de la magnificence de la nature aussi belle que cruelle. Amoureux de ses idéaux, des Femmes, de l’Écosse...

Je l'ai découvert par ses œuvres avant d'avoir le plaisir de rencontrer la personne derrière l'artiste. Bon nombre de ses précédents albums ont d'ailleurs été chroniqués ici : Le Petit Chaperon Rouge et Burlesque Girrrl (tome 1, tome 2).

François est un illustrateur-conteur expérimenté.
Feuilleter ses précédents livres est un voyage dans le temps et l'espace. Au début de sa carrière, il est imprégné de Japon et de la culture alternative des Gothic Lolitas, elle-même imprégnée par l'époque victorienne. Il est féministe, fasciné par l'autre sexe : sa fragilité, sa force, sa ressource sauvage face à la menace. Avec le temps, la multiplicité et complexité de ses influences enrichissent ses dessins et récits.
Il a gardé une âme d'enfant, s’enthousiasme, laisse parler sa curiosité. Cependant, c'est un homme lucide, engagé, les yeux grands ouverts sur les maux de notre monde et prêt à les dénoncer à la pointe du crayon. Un paladin des temps modernes qui sait contempler la noirceur sans s'y perdre, sait se pencher sur bord de la margelle du puis sans choir dans les profondeurs.

Hélas, comme d'autres artistes professionnels, il choisit la voie difficile de l'auto-édition pour porter un projet très personnel.



2 Qu'est ce que Les Destructeurs ?


Les Destructeurs est un projet BD ambitieux hors des clous des collections classiques tant par sa forme, proche du livre d'art, que par le fond : un roman graphique protéiforme, qui tient à la fois du conte fantastique, du récit d'aventure épique mais aussi de l'humour noir.

L'histoire

Shauna, une jeune londonienne, se sent mal, déphasée de ses contemporains. La vie ne l'a pas épargnée. Chaque jour est une lutte. Elle travaille le soir comme serveuse dans un pub, étudie le jour, et la nuit, s’effeuille devant sa webcam tant elle peine à joindre les deux bouts. Son quotidien terne et solitaire au cauchemar. La malchance lui colle à la peau avec une constance surnaturelle. Tant est si bien que Shauna se sent persécutée. Paranoïa ou risque réel ? Après une agression violente, Shauna pète un câble. Quelque chose en elle se rompt, ou peut-être se libère. La voilà soudain téléportée comme par magie dans un petit village d’Écosse.

Page 11 (cliquez pour agrandir)


C'est le début de la fin.

Les maux de notre monde moderne (la saleté, l’idiotie de la masse inerte, l'égocentrisme, la contamination radioactive...) s'incarnent pour devenir des nouveaux dieux tout aussi formidables que mortifères. Leur objectif est simple : anéantir Shauna. Leur particularité réside dans leur origine : ils sont des créations des hommes, que ce soit des conséquences de leurs actions ou de comportements particuliers. L'affrontement entre Shauna et ces créatures sera titanesque, apocalyptique. Une seule issue semble possible : la fin du monde.



Prologue, page 1 (cliquez pour agrandir)

Prologue : page 2 et 3 (cliquez pour agrandir)

Shauna est-elle la cause du carnage en refusant de mourir gentiment, en refusant de se sacrifier pour l'humanité ? Ou est-elle la sauveuse en éradiquant ces dieux asservissants ? Dans sa lutte, elle ne sera pas seule, avec à ses côtés, les membres disparates d'une équipe de cricket ! Tandis que notre groupe de héros lutte pour la survie de tout ce qui leur est cher, d'autres préparent lâchement leur fuite. Shauna par son refus de capituler et ses actions radicales devient le bouc émissaire idéal. Arrivera-t-elle à sauver l'essentiel avant que les faux-dieux et la stupidité des hommes ne la terrassent ?

Les Destructeurs est porté par la force de la mythologie nordique mais aussi de légendes et croyance de multiples origines, comme on le retrouve souvent dans les scénarios des jeux vidéo japonais qui puisent dans les cultures du monde entier et créent des panthéons cosmopolites.

Les dessins

Cette histoire est illustrée avec un style graphique très affirmé. François s'est depuis longtemps affranchi du découpage classique avec cases et phylactères pour incorporer à son récit des dessins plus proches de ceux des contes traditionnels.

Il opte pour une narration personnelle qui reste toujours d'une grande lisibilité. Nous sommes ici aux frontières de la BD comme peuvent le faire des auteurs tel que Sandoval, Almanza ou Richerand . La précédente série de François, Burlesque Girrrl, était déjà intime dans le propos. Là, il continue son chemin en toute liberté sans être entravé ni par les nécessités de plaire à un éditeur ni de satisfaire les désidératas du public : il nous propose une histoire coup de poing, sincère dans la description sans concession de notre société et de ses travers, pourtant sans tomber dans un discours moralisateur. Il manie l'humour, parfois absurde, parfois cynique mais jamais désespéré et toujours avec intelligence.




Les Destructeurs est à la fois un album divertissant et cathartique, mais aussi une fable philosophique où l'auteur règle ses comptes avec ce qui lui déplait dans notre monde et propose, par la fiction, une réalité alternative, porteuse de ses espoirs. Comme il le résume si bien, avec concision et insolente “Shauna est une menace pour les cons”. Les Destructeurs est un plaidoyer pour l'intelligence et le respect, un appel à ne pas se laisser malmener, à ne pas subir la loi de la masse. Un appel à la lutte pour préserver ce qu'on aime, ce qui nous émeut, ce qui nous rend humain.
Simplement jouissif.

3 Pourquoi le financement participatif ?


Le projet des Destructeurs a essuyé plusieurs refus des éditeurs (parfois avec des motifs hautement argumentés comme la forme de la bouche de l'héroïne) avant que François ne décide de remanier l'histoire. Il abandonne alors toute auto-censure et opte, comme tant d'autres, pour l'auto-édition avec un financement via Ulule afin d'avoir l'argent nécessaire à la fabrication et à la diffusion.

L'intérêt pour l'auteur est qu'il n'y a plus de limite dans la créativité. Bien évidement François raconte une histoire et donc obéit à des règles afin d'être compris, mais il ne subit pas la pression du marché et des règles du marketing qui impose la façon de traiter ou de passer sous silence certains sujets. Il est le maitre absolu de son histoire et de son dessin et n'a de compte à rendre qu'à lui-même et aux lecteurs. La contre partie est de devoir assurer, outre la création, tout le travail de l'éditeur (des corrections, à la fabrication, jusqu'à la diffusion et la promotion).


Shauna et les faux-dieux (cliquez pour agrandir)

Le financement a aussi un avantage pour le lecteur : Cette totale liberté de l'artiste donne originalité et force au projet. Les Destructeurs ne sont pas une BD insipide, pré-mâchée, formatée pour séduire. On arrête enfin de nous prendre pour des imbéciles qui ne peuvent pas comprendre si le scénario est complexe, si le dessin est différent des canons habituels. Je ne vais par ici jeter des cailloux à tous les éditeurs. Il existe encore certains courageux qui osent publier des ouvrages audacieux, le problème est qu'en général, les coûts inhérents à la chaine du livre font que l'auteur ne peut pas en vivre (en général il touche entre 3 et 8 % du prix du livre comme rémunération).

Le lecteur choisit son engagement : il peut juste acheter le livre en précommande au prix attractif de 26 euros (il coûtera plus cher une fois la campagne de financement achevé et sera en vente que sur les festivals ou le net (avec des frais de port). Il peut aussi être plus actif dans le soutien en choisissant de donner plus et d'avoir ainsi des contreparties très attractives (dédicaces, dessins, planches originales, goodies sympas). Pour les âmes de mécènes, la possibilité de donner simplement sans aucun retour existe aussi !

Le projet vient d'atteindre les 100 % à l'instant où j'écris ces lignes ! Tout l'argent supplémentaire collecté servira simplement à l'auteur pour qu'il puisse accomplir quelques dépenses triviales : payer son loyer, manger... En effet, le financement n'est pas un salaire mais juste de quoi fabriquer le bouquin. Concrètement, François doit aussi assurer d'autres travaux d'illustrations en parallèle.

4 Comment sera le livre ?


Si je ne vous ai pas encore convaincu de participer, voilà plus d'informations sur l'objet fini : Amateur des belles choses, des livres anciens à la reliure de cuir qui donnent aux bibliothèques leur charme et leur odeur, François souhaitait que son livre soit de qualité. Il apporte donc un soin particulier à la fabrication. Les Destructeurs ne sera pas une BD fanzine mais un ouvrage soigné, en un seul tome.

Projet de couverture (non définitif)
Voici les spécifications techniques : un format A4 de 96 pages. Une couverture cartonnée et toilée avec une impression dorée au fer chaud (cela crée un relief). La reliure sera un dos rond, elle est cousue (pas de pages collées qui finissent par prendre la poudre d'escampette), avec un signet. La tranche sera teinte en rouge. Le papier choisi est épais pour mettre en valeur les noirs et blancs des illustrations.

Vous avez jusqu'au 16 janvier 2015 pour participer au financement et pré-commander votre exemplaire. Après, il faudra l'acheter via le web ou en festival. Attention, le tirage va être limité à quelques centaines d’exemplaires. Une version traduite en anglais sera aussi disponible.






La page du projet :

Le site web de l'auteur :

Une dizaine de pages de la BD sont déjà en lecture sur son blog :

Deux entretiens avec François :

2 commentaires:

  1. Certes la voie de l'autoédition est difficile, mais c'est elle qui est la plus formatrice. J'ai tout apprit en produisant moi-même mon premier livre. Une fois cette première marche franchie, il faut trouver un éditeur et là ce sera la deuxième marche...

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  2. Dans le cas de François, il est déjà édité depuis des années (Soleil, Ankama...). Pourtant ce projet n'a été refusé en l'état. Ne souhaitant pas faire de concession, il a opté pour l'auto-édition. D'autres de ses BD vont sortir selon la voie "traditionnelles", une nécessité pour pouvoir (presque) vivre de ce métier.
    L'auto-édition est certes est formatrice, mais elle est aussi semée d’embuches qu'un auteur ne devrait pas à avoir à franchir. Sans compétence commerciale, l'auto-édition est un suicide. Hors, pour être auteur, il me parait aberrant de devoir aujourd'hui devoir aussi être éditeur, fabricant, diffuseur, commercial afin d'avoir une chance d'être lu. Surtout quand on est déjà pro, déjà reconnu par un lectorat de plusieurs milliers de personnes !

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Il s'affichera un peu plus tard, après sa validation.

Marianne