25 octobre 2011

Soleil levant, soleil mouvant




Au son du piano qui coule, l'automne court à ma fenêtre.

Les cieux rougis par la fraîcheur matinale embrassent une brume furtive. L'automne s'élève de la terre, comme la nuit. L'automne s'arrache des champs, elle nait dans le sous-bois. La pointe des fougères se crispe et se dessèche. Des volutes humides se tendent, se tendent et bientôt un lac calme de brouillard nappe les champs
Les nuages rubis s'enfuient, laissant le bleu trop bleu s'entendre à l'infini. Quelques lignes moutonnent encore. Résistance inutile à la mer cobalt.

Les cordes se mêlent au piano, une symphonie contemporaine et absurde. Tout n'est que poésie.
Poésie et colère.
Poésie et tourment.
Le rosé devient rose lumineux, rose orange. Il déchiquette l'horizon, hache la forêt et donne au miroir des eaux ses trésors de mystère. La musique s'adoucit, ralentit. De nouveau le piano attaque et s'impose au devant de la scène.
Comme le bleu trop bleu de ce matin d'octobre où je quitte Paris.




Découpé des arbres. Des bouts de ce bleu. L'automne court à ma fenêtre, grandiose, remarquable. Très loin là bas, au delà des villages et des près encore verts, une pointe carmine. Il est huit heures passée.

Le soleil est levé.

J'ai souvent l'impression que ma vie s'oriente, se courbe, dans les trains. En quelques heures je vois à ma fenêtre plus de paysage, de variété de formes et de couleurs, que durant des semaines, des mois. Et si le minuscule me fascine, je me nourris pourtant d'espace et d'horizon.

Un océan suspendu scintille en lévitation juste au dessus de la pointe rougeoyante de grenat.


Je comprend que l'on puisse préférer être démuni de tout que de vivre enfermé, déraciné. Dans la lueur déjà aveuglante du soleil levant, je comprend que les œuvres des hommes sont peu de choses pourtant, poésie des mots, des sons et des images vivent en harmonie avec notre planète. Sans le piano, la magie serait plus terne, sans le stylo, l'émotion moins profonde.

Aujourd'hui j'ai regardé un dieu ancien s'agripper à l'horizon. Face à cette immensité rassurante, je contemple ma vie.
Je suis heureuse d'être ici.
Dans ce mouvement. J'appartiens au monde. Et même si parfois, on ne se comprend pas toujours, le monde et moi, je suis fière d'être arrivée jusqu'ici, jusqu'à maintenant.
Fière d'avoir mon souffle, ma poésie. Dans quelques jours j'aurai 36 ans. C'est moins que beaucoup, c'est beaucoup plus que certains. Beaucoup plus que tous ces enfants...
Est-ce que les enfants de Fukushima auront aussi un jour le bonheur d'avoir 36 ans ?

Déjà, le bleu s'assagit. Il blanchit.

Le jour s'est levé. 


2 commentaires:

  1. Ca laisse un peu sans voix. Les aubes frileuses en automne ou en hiver sont les heures les plus propices à la poésie un brin spleen...

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  2. C'est ...doux et poétique...tant au niveau du texte que des photos...

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Il s'affichera un peu plus tard, après sa validation.

Marianne